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Hypocondriaque

ou comment se rendre malade

Publication : 07/09/2023

9 min

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Le corps humain est une machine particulièrement sophistiquée dont il faut prendre soin. Avoir mal à la tête, un peu de tension, mal au ventre, ça arrive. Souvent c’est bénin. Dans certains cas, ça peut être grave. 

Mais à quel moment considère-t-on que c’est sain de s’inquiéter de sa santé, et à quel moment ça devient pathologique ? En bref, à partir de quand considère-t-on que quelqu’un est hypocondriaque  ? Et comment soigner cette pathologie qui n’est pas qu’une maladie imaginaire ?

 💡 Le saviez-vous ?

On estime qu’entre 1% et 5% de la population mondiale souffre d'hypocondrie. Cette pathologie touche aussi bien les hommes que les femmes.

Être hypocondriaque, qu’est-ce que c’est ?

C’est une anxiété ou une peur démesurée liée aux manifestations du corps. 

Que ce soit un bouton, une palpitation cardiaque ou un mal de ventre. Les hypocondriaques vont s’inquiéter de manière excessive, notamment en basant leurs interprétations sur des manifestations réelles, mais pourtant normales, du corps. L’anxiété qui en découle, par contre, est réellement handicapante, notamment sur la vie quotidienne ou les relations sociales.

Quels sont les symptômes de l’hypocondrie ?

L’hypocondrie se manifeste par plusieurs comportements, comme :

👉 Une obsession de tomber gravement malade ou de l’être déjà

Les pensées de l’hypocondriaque reviennent constamment sur la maladie. Et il a du mal à se rassurer sur le fait qu’il ne soit pas malade.

👉 L’observation compulsive du corps et de ses manifestations

C’est-à-dire, le fait d’observer son corps en permanence, sans pouvoir s’en empêcher. Une douleur dans la poitrine, et hop! L’esprit est focus dessus. On ne peut pas s’en empêcher.

👉 La consultation régulière de médecins

Le besoin de réduire l’anxiété par la consultation régulière de médecins. Mais souvent, comme le diagnostic est bénin, les hypocondriaques vont chercher un autre avis médical auprès d’autres spécialistes pour confirmer l’idée qu’il s’était faite de leur maladie. Ils peuvent également multiplier les examens médicaux.

👉 L'inscription dans le temps

Le fait que l’obsession autour de la maladie dure depuis plus de 6 mois. Oui, si vous avez un énorme bouton qui vous pousse dans le dos du jour au lendemain, c’est normal que cela vous inquiète. Ce qui l’est moins, c’est que vous vous inquiétiez un jour de ne pas avoir faim, la semaine d’après, d’avoir trop mal à la tête, puis d’avoir une pulsation cardiaque trop élevée, etc. C’est le fait que ça dure dans le temps et de s’inquiéter de manifestations du corps différentes qui est pathologique.

La cybercondrie : quand internet favorise l’hypocondrie

On l’a tous fait.

Un p’tit bobo, hop on tape les symptômes sur un moteur de recherche pour savoir ce que c’est. Et là, horreur, malheur ! Ce que vous pensiez être un modeste poil incarné se révèle être, selon Doctissimo, Passeport Santé, le Journal des Femmes et même un obscur site de médecine ayurvédique, ce poil incarné se révèle être, donc, une folliculite ! 

 

Tout de suite, les sites parlent de trouble pileux, de diagnostic, d’inflammations, d’infections, de traitements locaux à base de corticoïdes, de peroxyde de benzoyle ou de rétinoïdes. Bref, tout un champ lexical dont les mots contiennent beaucoup trop de “x” et de “y” pour être honnêtes.

cybercondrie

Vous qui pensiez simplement gérer la situation avec un peu de spray antiseptique et une pince à épiler, on vous dir, qu'en cas de doute, vous devez CONSULTER UN MEDECIN. Et justement, là, vous commencez à douter...

 

Et si ça n’était pas seulement un poil incarné ? Et si c’était un kyste ? Et si vous en aviez un autre que vous n’aviez pas vu ? Parce que justement, c’est pas la première fois que ça arrive … Vous avez peut-être un problème de peau ? Et ainsi de suite. 

 

Ça y est. 

 

Toute cette histoire commence sérieusement à vous stresser. Et vous n’arrivez plus à dissiper le doute. Voilà, c’est ça l’effet de la cybercondrie. C’est le fait de cultiver son hypocondrie en consultant des sites internets. Et c’est très sérieux. 

 

Internet permet d’avoir accès à une base de données quasiment infinie et qui se renouvelle sans cesse. Mais le problème de l’accès à l’information, c’est que c’est à l’internaute de filtrer les informations. 

Or, il suffit d’avoir tapé les mauvais mots clés dans une barre de recherche pour se retrouver au mauvais endroit. De plus, beaucoup d’informations brutes ne sont pas à prendre telles que, mais à mettre en perspective avec d’autres facteurs. Un médecin va examiner les patients en fonction de leurs antécédents, de leur contexte particulier, de différents symptômes et il va réaliser des examens. Il va surtout filtrer les informations au prisme de ses 8 ans d’études de médecine (au moins), pour donner la bonne information. 

 

Un site internet ne connaît pas du tout la personne qui est derrière son écran. (d’ailleurs, qui êtes-vous ?). Le seul conseil avisé qu’il puisse vraiment vous donner est d’aller consulter un médecin si vous avez un doute.

Les manifestations somatiques : quand l’hypocondrie engendre des maladies

L’hypocondrie est un trouble somatoforme.

C’est-à-dire que c’est une pathologie qui touche à la fois la santé mentale et physique. Contrairement à une idée toujours reçue, le corps et l’esprit ne sont pas deux mécaniques totalement dissociées. Au contraire. L’un influence l’autre et vice versa. 

Beaucoup de marathoniens vous diront qu’ils ont “tenus au mental”. C’est donc bien qu’il y a une influence du mental sur le physique. Et malheureusement, parfois, il peut être pathologique.

 💡 Le saviez-vous ?

Les troubles hypocondriaques sont associés aux troubles anxieux. Or les troubles anxieux sont basés sur un mécanisme de survie : la peur. 

Avant, quand nous n’étions encore que des Homo sapiens, il fallait un mécanisme très efficace pour répondre aux dangers environnants (comme les animaux sauvages, les tribus rivales ou les manifestations climatiques soudaines). Et en ça, la peur est particulièrement efficace. La peur déclenche tout un tas de réactions physiologiques qui vont préparer le corps à fuir ou à se battre. 

La première réaction est de mobiliser tous les muscles et les fonctions mobiles dans la fuite ou le combat. Il y a donc une montée d’adrénaline. Le rythme cardiaque s’accélère et la pression artérielle augmente pour que le sang apporte l’oxygène nécessaire aux muscles afin qu’ils réagissent. Les pupilles se dilatent pour observer au mieux l’environnement. La sudation aussi augmente et les poumons fonctionnent à bloc pour faire respirer tout ce petit monde.  

 

Mais à l’inverse, la peur a une deuxième réaction de mise au repos des organes qui ne sont pas utiles. Le système immunitaire et le système gastro-intestinal sont mis au repos (ou évacué très rapidement - On se comprend). 

 

Une fois que le danger est passé, l’organisme retrouve son équilibre et tout rentre dans l’ordre. En fonction des individus, on a faim, froid, une grosse fatigue ou les trois. Et tout rentre dans l’ordre. 

 

Or, si la peur est un mécanisme liée à un contexte et à un événement particulier, l’anxiété, elle, ne se focalise sur rien de précis. Elle est latente. Mais elle peut créer les mêmes réactions physiologiques que la peur sur le long terme. 

 

Dans les cas les plus graves, l’anxiété produite par l’hypocondrie peut donc engendrer : 

  • des troubles digestifs

  • des maux de têtes

  • une augmentation de la pression artérielle

  • et d’autres symptômes qu’on ne va pas vous énoncer parce que vous auriez l’impression de les avoir

En ça, l’hypocondrie est un véritable cercle vicieux. Le patient stresse parce qu’il observe des manifestations bénignes sur son corps. Son corps subit le stress. Il finit par en souffrir. Ce qui alimente l’hypocondrie, et donc le stress. Et ainsi de suite. 

 

L’hypocondrie n’est donc pas une pathologie à prendre à la légère.

Hypocondrie : l’origine du mal

 💡 Le saviez-vous ?

L’hypocondrie peut survenir suite à un attachement insécure pendant l’enfance ou à des traumatismes.

Un attachement insécure

La théorie de l’attachement, développée par Bowlby et Ainsworth, propose que la façon dont les parents sécurisent leurs enfants a une influence sur leurs comportements futurs. Dans le cas de l’hypocondrie, il est intéressant de creuser si les parents de l’hypocondriaque ne s’occupait de lui uniquement que lorsqu’il était malade. Dans ce cas, la personne aurait appris dès son plus jeune âge que le fait d’être malade était le meilleur moyen d’avoir de l’attention et de l’affection des autres et reproduirait ce schéma à l’âge adulte.

Un traumatisme

L’hypocondrie peut également survenir suite à un traumatisme. Si par exemple, un parent ou un proche est mort subitement à la suite d’une maladie diagnostiquée trop tard, le choc lié à cette mort soudaine peut créer un traumatisme. Notamment si l’événement traumatique s’est passé lorsque la personne était jeune. Dans ce cas, l’hypocondrie aurait surtout pour objectif d’éviter un diagnostic erroné ou tardif.

Quelle est la conduite à tenir si l’un de vos proches est hypocondriaque ?

#1 Écouter et croire la personne

Non, l’hypocondrie n’est pas une maladie imaginaire. La première chose à faire si l’un de vos proches ou votre compagne est hypocondriaque, est d’écouter. A quoi ça ressemble vraiment ? A quel moment l’hypocondrie s’est-elle manifestée ? Dans quel contexte est-ce que l’hypocondrie est la plus présente ? Et évidemment, orientez votre proche vers un médecin ou un psychologue si vous avez l’impression qu’elle en a le besoin.

#2 Rappelez-vous que l’hypocondrie est une pathologie

Mais ça n’est pas la personne. La personne que vous connaissez souffre d’une pathologie très envahissante qui l’empêche souvent d’être qui elle voudrait vraiment être. Dissociez bien les deux.

#3 N’essayez pas de lui prouver qu’elle a tort

Ça ne sert à rien de lui démontrer par A+B que son angoisse est absurde. Même les médecins n’y arrivent pas. À l’inverse, faites particulièrement à votre communication et détournez son attention, aidez là à revenir dans l’instant présent, notamment par la méditation de pleine conscience.

Comment se soigner ?

Homme guéri

La bonne nouvelle est que l’hypocondrie se soigne.

C’est une pathologie certes envahissante, mais pour laquelle on a de bons résultats en thérapie.

 💡 Le saviez-vous ?

Un psychologue peut vous aider à réduire l’angoisse lorsqu’elle arrive, à mieux comprendre d’où elle vient et à traiter le problème à la source.

Plusieurs types de thérapies peuvent vous aider à réduire l’hypocondrie.

Thérapies émotionnelles, cognitivo comportementales (TCC)

​Elles vont vous accompagner pour comprendre quand survient l’anxiété liée à l’hypocondrie et vous apprendre à la réduire au fur et à mesure. Par ailleurs, un travail de fond pourra également être effectué pour trouver la source de cette pathologie et mieux l’appréhender.

Vous êtes en difficulté ?

On est là pour vous et on a bien bossé :

On a rassemblé les meilleurs psychologues, spécialisés dans la santé mentale masculine.

La crème de la crème.

L'EMDR

C'est une technique de thérapie basée sur des stimulations bilatérales alternées. Autrement dit, le patient suit du regard des stimulations de droite à gauche (un pendule ou le doigt du psychologue). Les stimulations peuvent aussi être des tapotements légers, que le patient se fait lui-même, sur une jambe, puis l’autre, ou sur les épaules. 

Cette technique s’est avérée très efficace pour gérer des traumatismes. Or, si votre hypocondrie est liée au décès soudain d’un proche, cela peut être un excellent moyen de revenir sur cet évènement.

Les traitements médicamenteux

Quand l’anxiété est trop difficile à gérer, un psychiatre peut prescrire des anxiolytiques dans les périodes les plus difficiles et des antidépresseurs pour traiter la pathologie sur le long terme. 

En attendant la thérapie, voici 3 conseils :

Homme donnant des conseils

#1 Attention au biais de confirmation d’hypothèse

Oui, trouver des informations sur internet, c’est particulièrement pratique. Mais notre cerveau adore avoir raison. Et quoi de mieux pour avoir toujours raison que le biais de confirmation d’hypothèse ? Le fonctionnement est simple : déjà, il faut ne garder que les informations qui vont dans le sens de votre hypothèse (c’est l’exposition sélective), 

Exemple : les poils incarnés sont souvent bénins, mais dans de rares cas, ils vont s’infecter. 

Devient : Les poils incarnés (...) vont s’infecter. 

 

Ensuite, le biais de confirmation d’hypothèse fonctionne mieux lorsque les informations qui ne correspondent pas à l’hypothèse sont dénigrés. 

Par exemple (fictif) : “Source le Monde : les poils incarnés sont souvent bénins, mais dans de rares cas, ils vont s’infecter.” 

Devient : “oui, mais le Monde, ça n’est pas un journal médical, qu’est-ce qu’ils en savent ?” 

Quand vous faites des recherches sur le web, vous posez-vous cette question : est-ce que je cherche une information objective, ou est-ce que je cherche à confirmer ce que je crois ?

#2 Revenir dans l’instant présent

Quand vous sentez que l’angoisse monte, revenez dans l’instant présent. Concentrez-vous sur la pièce dans laquelle vous êtes, sur les personnes avec qui vous êtes, sur ce que vous entendez, voyez, sentez, ou pouvez toucher. 

La méditation de pleine conscience ou la sophrologie sont des techniques très efficaces pour aider à gérer une angoisse.

#3 Se remettre au sport ?

Et si vous appréhendiez votre corps d’une autre manière ? Non pas comme un corps potentiellement malade, mais plutôt comme un corps sain et capable de vous emmener loin ? Le sport permet de se défouler (et donc de gérer l’anxiété), mais aussi de ressentir son corps autrement. Pas la peine de commencer par un marathon. Une petite marche pour lutter contre l'hypocondrie, ça vous dit ?

Par Marie-Anne Kantor

Master en psychologie sociale

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